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WILLAME Jean-Claude

Point sur la situation critique en RDC

31 octobre 2008

Au vu des tous récents développements en République Démocratique du Congo (menaces sur Goma et prise probable de Rutshuru par le CNDP), je me permets de vous envoyer en urgence le texte suivant :

1. En mai 2007, le Conseil de Sécurité adopte une résolution qui, pour la première fois, donne en mandat fort à la MONUC [1] désormais autorisée à utiliser la force pour venir à bout des bandes armées congolaises (y compris celle de Nkunda [2]) et étrangères (FDLR [3]). Plus question d’observation ou même de simple protection des populations. Un engagement de type proactif et même offensif est décidé par le Conseil de Sécurité : la MONUC pourra appuyer, par des tactiques d’encerclement et de recherche (cordon and search), des opérations menées par les FARDC [4] contre les bandes armées étrangères ou allochtones. En décembre, cette résolution est reconfirmée par la Conseil de Sécurité après la défaite cinglante essuyée par les FARDC contre les troupes plus aguerries et mieux équipées du « général-pasteur » félon, Laurent Nkunda. A la même époque, un « plan directeur » de la réforme du secteur de sécurité, qui s’est fait longtemps attendre, prévoit la mise sur pied d’une Force de réaction rapide (FRR) congolaise constituée de brigades « correctement équipées, bien soutenues, bien entretenues et bien commandées au terme d’une sélection rigoureuse », les Etats-Unis ayant déjà fait savoir quelques mois plus tôt qu’ils pourraient apporter leur soutien à une telle force et que celle-ci pourrait être mise en route en janvier 2008. EUSEC [5] a appuyé de son côté ce concept.

2. A partir de septembre 2007, deux processus de paix contradictoires vont être mis en route. D’une part l’accord de Nairobi qui concerne avant tout le démantèlement des bandes du FDLR par les FARDC et la MONUC si ces bandes et leurs dépendants refusent de rentrer au Rwanda. Le gouvernement congolais "s’engage à préparer pour le 1er décembre 2007 un plan détaillé pour désarmer les ex-FAR/Interahamwe et éliminer la menace qu’elles constituent" "Il sera demandé à la MONUC de fournir un soutien pour la planification et la mise en oeuvre" de ce plan "en accord avec son mandat et ses moyens", précise le texte. D’autre part, l’accord de Goma, pour lequel les FDLR ne sont pas concernés, prévoit un plan de désengagement à la fois des FARDC et des autres bandes armées (dont le CNDP) sur des positions convenues afin que le brassage ou la réintégration des bandes armées dans la vie civile puisse commencer. On met ainsi sur le même pied les FARDC et les bandes armées.

3. A partir de juin 2008, on peut considérer que ces deux accords sont morts. D’une part, il n’y a pas de plan pour un démantèlement des FDLR (qui viennent parfois peut-être donner des “coups de main” aux FARDC pour attaquer le CNDP de Nkunda). D’autre part, à partir de juin, le CNDP de Laurent Nkunda quitte les réunions de la commission qui travaille sur le calendrier de désengagement, de brassage etc... prévu dans l’accord de Goma. Des accrochages ont régulièrement lieu entre ses troupes et les FARDC tandis que Laurent Nkunda place la barre encore pus haut d’abord en récusant l’accord de Goma puis en appelant à un “soulèvement national”. Par ailleurs, la MONUC apparaît comme paralysée devant les évolutions : elle “proteste, dénonce, regrette” tandis que son commandant, qui estime ne pas avoir les moyens de réagir, démissionne et que les violences populaires se déchaînent contre son impuissance à faire respecter le mandat dont elle est chargée et qu’elle ne parvient plus à “protéger les populations civiles” comme le prévoit aussi son mandat : pour preuve, de 350.000 déplacés au Nord Kivu en fin 2007, on est passé aujourd’hui à un chiffre allant de 1,4 à 2 millions.

Face à cette situation, il faut à mon sens se ressaisir et réintroduire une logique dans ce dossier. Ceci signifie :

  • mettre en route de toute urgence, en association avec la MONUC et EUSEC, les forces de réaction rapide congolaises prévues dans le plan directeur de la Défense nationale congolaise tout en cantonnant et casernant le reste de l’armée congolaise ;
  • obtenir des pays contributeurs de troupes dans la région (Pakistan et Inde) l’application des directives opérationnelles permettant des actions offensives (cordon and search) contre les bandes armées comme le prévoit la résolution du 15 mai 2007 du Conseil de Sécurité ou alors déployer d’autres troupes dont les pays acceptent ces directives ;
  • Si cela ne s’avérait pas possible, préparer, en concertation avec la DPKO de l’ONU (Département des opérations de maintien de la paix), l’envoi de deux forces d’intervention rapide européennes (battle groups composés de 1500 hommes chacune) qui, depuis l’an dernier, peuvent être déployées dans les quinze jours sur un ou deux terrains d’opération. La Belgique, qui est partie prenante de ces “battle groups” devrait pouvoir être associée directement ou indirectement à ce genre d’opération : pour ce faire, il faut faire annuler par le Parlement la résolution de 1997 qui prévoit que la Belgique ne pourra s’associer à des opérations militaires dans ses ex-colonies ;
  • Relancer les mandats d’arrêt internationaux contre Laurent Nkunda et son associé Bosco Ntanganda, accusé explicitement de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité par la CPI, et lancer ou poursuivre résolument les enquêtes internationales à l’encontre de ces deux chefs de guerre.
  • Réactiver les enquêtes du groupe d’expert des Nations unies sur l’exploitation illégale des ressources congolaises qui, selon les plus récents rapports d’ONG internationales et congolaises (Voir IPIS et Fatal Transaction), continue de plus belle de la part tant des FARDC (en particulier 8ème brigade non brassée à Walikale) que des autres groupes armés.

[1] Mission de l’ONU en République démocratique du Congo

[2] Laurent Nkunda est le chef du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP)

[3] Forces démocratiques de libération du Rwanda, les rebelles hutus rwandais

[4] Forces armées de la République démocratique du Congo

[5] Mission de conseil et d’assistance de l’Union européenne en matière de réforme du secteur de la sécurité en République démocratique du Congo

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