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Haïti : une dernière chance à saisir pour rendre justice au peuple haïtien

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Le blocage des fonds Duvalier en Suisse :

> Renaud Vivien

Le 31 mai 2007, le Conseil fédéral de la Suisse a décidé de geler pour trois mois supplémentaires (jusqu’au 3 septembre) des avoirs d’un montant de 7,6 millions de francs suisse détournés par l’ancien dictateur d’Haïti Jean-Claude Duvalier dit « Bébé Doc » qui a dirigé le pays entre 1971 et 1986. Cette somme déposée sur un compte ouvert à l’Union des Banques Suisses (UBS) au nom de la fondation Brouilly, une société qui sert à couvrir les avoirs de la famille Duvalier en Suisse, devait en effet être restituée le 3 juin 2007 à la famille Duvalier. Mais le gouvernement suisse en a décidé autrement en se fondant sur l’article 184 alinéa 3 de la Constitution fédérale qui lui donne mission de sauvegarder les intérêts du pays, notamment quand sa réputation internationale est en jeu. Cette décision de geler les fonds fait suite à une demande de mise sous séquestre introduite par deux anciens opposants au régime de Duvalier. Ces derniers veulent faire reconnaître par la justice suisse un jugement de la Cour de Miami datant de 1988 qui leur accordait 1,75 millions de dollars (plus les intérêts depuis 1988) à titre de réparation des dommages qu’ils ont personnellement subis. Le jugement accordait galement 504 millions de dollars au peuple haïtien. Mais cette décision de justice est restée lettre morte à cause du secret bancaire. C’est grâce à des informations transmises par des confrères haïtiens que les avocats des deux plaignants ont pu identifier le compte ouvert à l’UBS.

Le compte à rebours a donc démarré : les avocats ont jusqu’au 3 septembre pour prouver l’origine frauduleuse de ces 7,6 millions de francs suisse afin de les restituer aux requérants haïtiens. Mais la procédure suisse de l’entraide judiciaire rend difficile la restitution de ces fonds. Le secret bancaire est le deuxième obstacle juridique (et surtout politique) à la restitution des biens mal acquis à la population haïtienne. Avant d’aborder ces deux points, il est nécessaire de revenir sur la procédure judiciaire déclenchée en 1986 en Suisse.

Historique de la procédure judiciaire en Suisse

Le 4 avril 1986, Haïti formula une demande d’entraide judiciaire pour que la Suisse saisisse tous les biens et fonds appartenant à la famille Duvalier. Après avoir bloqué les fonds dès 1986, la Suisse a tenté d’obtenir de la part des autorités haïtiennes les preuves que les fonds avaient bien été détournés. La transmission des preuves par Haïti est indispensable pour permettre de lui restituer l’argent détourné. Mais cette procédure d’entraide judiciaire prend fin en 2002 car l’appareil judiciaire déficient de l’île n’a pu fournir ces preuves. Le Conseil fédéral décide de prolonger le gel des fonds, une première fois en 2002 et une deuxième fois en juin 2005, pour une durée maximale de deux ans afin que le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) parvienne à un accord à l’amiable avec la famille Duvalier. A quelques jours de l’expiration de ce délai, le gouvernement suisse a prolongé une nouvelle fois le gel des fonds jusqu’au 3 septembre 2007 pour permettre une dernière action judiciaire en restitution. Mais les dispositions de la loi fédérale sur l’entraide judiciaire en matière pénale de 1996 qui régissent la restitution des biens mal acquis comportent « une lacune juridique choquante », selon l’ambassadeur Paul Seger qui est à la tête de la direction du droit international public du département fédéral des affaires étrangères.

La nécessité de réviser la loi fédérale sur l’entraide judiciaire en matière pénale Le principe posé par cette loi est que l’entraide judiciaire en matière pénale n’est possible que lorsque les autorités compétentes d’un Etat (l’Etat requérant) décident de prendre des mesures concrètes en vue d’une procédure pénale et demandent officiellement à un autre Etat (l’Etat requis) leur coopération. Autrement dit, si l’Etat requérant ne parvient pas à prouver l’origine frauduleuses des biens ou des fonds qui se trouvent dans l’Etat requis, alors l’Etat requis ne peut accepter la demande d’entraide judiciaire de l’Etat requérant. Ce qui entraîne le déblocage de ces biens ou fonds au profit de la personne accusée de détournement.

Dans les faits, cette loi revient donc à récompenser celui qui, comme Duvalier, a affaibli l’autorité judiciaire de son pays incapable de déposer la demande d’entraide judiciaire. Cette absence de coopération ne doit alors pas être interprétée comme un manque d’intérêt de la part d’Haïti. Par conséquent, une révision de la loi s’impose pour restituer l’argent détourné aux pays spoliés lorsque le dysfonctionnement de leur système judiciaire est la conséquence directe de la politique d’un dictateur. Soulignons que le même cas de figure risque de se renouveler en 2008 avec l’expiration du délai de blocage des fonds de l’ex-dictateur zaïrois Mobutu puisque la République démocratique du Congo n’a pas transmis de demande d’entraide judiciaire pour récupérer ces avoirs. Lire cet article

date de mise en ligne : 21 juillet 2007

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