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SALAMAND Bernard

Mondialisation, crise du modèle démocratique : ce monde peut-il être gouverné ?

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> Peuples en marche, n°188, septembre 2003

D’un côté une mondialisation qui dépossède de fait les Etats d’une part de leur capacité à gouverner et à agir, de l’autre une crise de la légitimité, y compris dans les régimes de démocratie formelle. Est-il aujourd’hui nécessaire de déplacer à un niveau supra-étatique les moyens de gouverner ? Si oui, à quelles conditions ce nouveau pouvoir peut-il s’exercer au nom d’un intérêt collectif, “planétaire” ? La question de la “gouvernance” mondiale - le terme fait florès - se pose avec acuité. Et avec une certaine urgence.

Sur la planète, il n’y a aujourd’hui plus moyen d’échapper à l’activité des autres. La fameuse mondialisation, c’est-à-dire la multiplication des zones d’interrelations, réduit la marge de manœuvre des activités de gouvernement jusque-là dévolues aux Etats.

En matière économique, pour les Etats, la dépossession des moyens de gouverner est évidente. Elle s’est accélérée récemment sous les coups de boutoir du néo-libéralisme, donnant à des instances “indépendantes” (autrement dit non contrôlées démocratiquement - l’OMC ou les banques centrales) la capacité de réguler partiellement l’économie mondiale et laissant aux acteurs multinationaux (les firmes et les opérateurs financiers) la possibilité d’agir avec de moins en moins de contraintes.

En matière environnementale, il n’est pas nécessaire de démontrer la dimension mondiale de certains problèmes : la désertification, la réduction de la diversité biologique, les changements climatiques et les émissions de gaz à effet de serre en sont les exemples les plus connus. La profondeur et l’étendue de ces problèmes rangent au rang de symbole toute politique nationale, et impose des solutions mondiales.

En matière de relations internationales et de paix, le mode de prévention et de règlement des conflits que constituait théoriquement l’Organisation des Nations unies depuis la fin de Seconde Guerre mondiale a montré sa caducité à l’occasion des guerres du Golfe et de la guerre d’Irak. L’assemblée multilatérale n’a pas la force de s’opposer à l’impérialisme actuel des Etats-Unis, ni même le courage d’émettre des résolutions dénonciatrices à leur encontre.

Pourtant, ces conflits - par les symboles qu’ils véhiculent médiatiquement et par les enjeux économiques qu’ils représentent - sont on ne peut plus mondiaux.

Un modèle démocratique malade

Un nouveau mode de “gouvernement du monde” doit aussi répondre à la crise que connaissent les pays à tradition démocratique dans lesquels la participation électorale est au plus bas, la représentativité des élus déconsidérée et la participation populaire aux décisions collectives rare. Le modèle démocratique va mal. Il est accusé de tricherie et de collusion avec les puissants. Il ne pourra sans doute plus longtemps prétendre au titre de panacée de l’organisation politique institutionnelle, à moins d’évoluer vers la prise en compte des aspirations des populations socialement et économiquement démunies.

Dans ce double cadre - celui de la mondialisation des problèmes et celui de la légitimité des décisions politiques y compris en démocratie formelle - la question de la gouvernance mondiale se pose avec acuité et avec urgence.

Pourquoi utiliser la notion de gouvernance mondiale ?

De même que la démocratie est une notion variable suivant, par exemple, les places respectives accordées à la représentation et à la participation dans les institutions, la notion de “gouvernance” peut être comprise de diverses manières.

D’où vient la gouvernance ?

Le terme lui-même, après avoir été synonyme de "mode de gouvernement" puis être tombé en désuétude, est réapparu avec l’expression “gouvernance d’entreprise”, utilisée pour qualifier les procédures de relations internes et externes de l’entreprise hors du marché. Ensuite, le terme “gouvernance urbaine” a été forgé dans l’étude des politiques des autorités locales britanniques après les réformes de Mrs Thatcher, et vite généralisé à l’étude des pouvoirs locaux. Enfin, l’expression “bonne gouvernance” est apparue sous la plume des institutions financières internationales pour désigner des administrations publiques fonctionnelles dans les pays soumis aux plans d’ajustements structurels.

Culture néo-libérale

On le voit, l’utilisation du terme - à l’initiative des anglo-saxons - est souvent empreinte de culture néo-libérale. Aussi, sa connotation symbolique est telle que certains préfèrent jeter le bébé de la gouvernance avec l’eau du bain néo-libéral, et refusent même d’utiliser le concept, de peur de faire le jeu des puissants [1].

Ce concept de gouvernance demeure pourtant en débat et n’est la propriété figée d’aucune école de pensée [2]. Une idée semble pourtant commune à la plupart des définitions : à la rigidité d’un “gouvernement” au sommet d’une pyramide, habilité à prendre des décisions et à les faire appliquer, on peut opposer une “gouvernance” plus interactive et prenant en compte la diversité des intervenants.

Reste ensuite - et c’est bien entendu à partir de là que les options divergent - à déterminer le “pourquoi” d’une telle gouvernance et, surtout, le “comment”...

Pour la première question, il est évident que la réponse des néo-libéraux (remplacer un pouvoir administratif régulateur par un pouvoir uniquement au service de l’efficacité économique) ne nous intéresse pas. Nous recherchons plutôt une gouvernance mondiale qui apporte des réponses justes et légitimes aux questions communes à tous les peuples, en permettant à tous, y compris aux plus démunis, d’intervenir dans la décision.

Pour le “comment”, nous ne nous sommes pas aventurés, dans ces pages, à proposer un quelconque mode d’organisation [3].

Nous avons juste décrit certains champs dans lesquels la gouvernance mondiale devra s’imposer (politique, social, économique, environnemental) et donné quelques exemples actuels d’interventions de la société civile organisée pour participer à des décisions, pour en empêcher d’autres, pour faire des propositions alternatives. Le chantier est énorme. Il est du ressort de chaque citoyen.

[1] Bernard Cassen, Le Monde diplomatique, juin 2001.

[2] Lire la remarquable synthèse documentaire de Nathalie Holec (Association 4D) et Geneviève Brunet-Jolivald (Centre de documentation de l’urbanisme). http://www.urbanisme.equipement.gou....

[3] D’autres ont commencé, comme l’Alliance pour un monde responsable, pluriel et solidaire. Lire le Cahier de proposition “Pour une gouvernance mondiale efficace, légitime et démocratique”, coordonné par Pierre Calame, Editions Charles-Léopold Mayer, 2003

document de référence rédigé le : 1er septembre 2003

date de mise en ligne : 9 septembre 2004

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