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BENJAMIN Sabine

Economie populaire : combattre les inégalités, bâtir une nouvelle citoyenneté

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Après deux décennies de dérives économiques et politiques et deux guerres (1996 et 1998), insécurité, pillages, difficultés d’approvisionnement, chômage... sont le lot quotidien de la population du Sud-Kivu, en République Démocratique du Congo. Dans ce pays où 76% de la population vit sous le seuil de pauvreté, c’est le “secteur informel” (ou “économie populaire”), tenu essentiellement par les femmes, qui assure la survie de la population.

Zita Kavungirwa, chargée de programmes de l’Apef [1] , témoignait à Porto Alegre du travail déjà réalisé.

Les femmes actrices économiques

« L’Apef est une association qui a été créée par et pour les femmes afin de les aider à subvenir durablement aux besoins de leurs familles. Beaucoup d’hommes ayant été mobilisés ou ayant perdu leurs emplois, les femmes qui avaient longtemps été cantonnées dans la sphère familiale ont dû, par la force des choses, se transformer en acteurs économiques. En 1996, nous avons commencé à travailler avec environ 45 femmes. Aujourd’hui, nous comptons plus de 800 membres, réparties en 27 groupes de base. 600 petits commerces et micro-entreprises de service ont déjà été créés.

S’organiser, se former, développer et diversifier des activités économiques porteuses, redéfinir la place des femmes au sein de leur famille et de la société... Tels sont les principaux défis que nous nous sommes données.

Pour démarrer au plus vite une activité génératrice de revenus de survie, les femmes de l’Apef s’engagent, dans un premier temps, dans des filières où elles possèdent un savoir-faire traditionnel. Par exemple la vente de produits alimentaires qui nécessite peu de capital de départ. Petit à petit, elles cherchent à évoluer vers des activités de transformation et de production (tricot de layette, fabrication de sirop et confiture, teinture de tissus...). Pour les soutenir, l’Apef s’appuie sur trois éléments : la formation (gestion, droit, comptabilité...), la mise à disposition de matériel et d’équipements, et le micro-crédit solidaire.

Ne plus dépendre d’usuriers, grâce au micro-crédit

Avant la création de l’Apef, les femmes étaient à la merci d’usuriers peu scrupuleux qui les maintenaient dans une situation de dépendance et d’arbitraire. C’est pourquoi nous avons décidé de mettre en place un système de micro-crédits solidaires rotatifs dont le remboursement par les unes permet l’octroi de crédits aux autres. Plusieurs centaines de micro-crédits individuels sont alloués chaque année pour une période de 6 mois, avec un taux d’intérêt mensuel de 2%. Près de 100% des crédits sont remboursés, ce qui constitue une réelle performance dans un contexte économique si difficile !

S’organiser pour résister à l’arbitraire et améliorer sa position sociale et familiale

Devenues plus autonomes grâce à leur regroupement, les femmes sont plus à même de faire respecter leurs droits sur les marchés, négocier avec les autorités, les grossistes, résister aux abus de pouvoir des militaires et autres “forces de sécurité”. Il est important de souligner que le combat que nous menons dans un contexte si difficile a été une opportunité pour rompre avec la marginalisation dont les femmes étaient victimes. Ainsi, des droits à la mesure des responsabilités qu’elles assument leur ont été reconnus. Une nouvelle répartition des tâches est apparue au sein des familles. Elles sont d’ailleurs de plus en plus souvent identifiées comme des interlocutrices à part entière par les autorités locales... Tout ne s’est pas fait du jour au lendemain, il reste beaucoup de chemin à parcourir. Mais nous organisons des rencontres avec les maris et les enfants de ces femmes, ainsi qu’avec les autorités locales, afin de mener, dans la durée, une réflexion sur le rôle de chacun.

Vers la construction d’une nouvelle citoyenneté

L’unique but de l’Apef n’est pas de diminuer la pauvreté par des activités économiques, les femmes veulent également être reconnues comme des citoyennes à part entière. En République Démocratique du Congo, l’exacerbation des tensions ethniques et religieuses à des fins politiques a déjà eu des conséquences très graves. Pour apporter notre pierre à la construction de la paix, l’Apef a intégré des femmes appartenant à des ethnies différentes. Les activités et les réflexions menées en commun permettent un échange et un dialogue. Un message de tolérance est ainsi transmis aux enfants et pris en compte par les familles.

Les formations que nous proposons aident ces femmes à refuser la fatalité. Nous les soutenons dans leur prise de conscience individuelle, elles se rendent compte qu’en s’organisant on devient plus fort et que l’on peut faire pression sur le système qui nous opprime au niveau local et international.

Le Forum social mondial

Lors du FSM, j’ai rencontré des citoyens qui partagent cette idée que les richesses sont très inégalement réparties et que nous les femmes, nous avons un rôle à jouer pour que nos droits, reconnus par la loi, ne soient pas bafoués au nom de la coutume. A nous en tant que mères de transmettre ces valeurs aux générations suivantes. Chaque citoyen doit prendre conscience de sa richesse intérieure et de sa capacité à contribuer à la construction d’un monde plus juste. Le Congo appartient à tous, chacun doit pouvoir jouir de ses droits économiques, sociaux, politiques et culturels.

[1] Dès 1996, dans la région de Bukavu, des femmes à faibles revenus ont décidé de se regrouper au sein de l’Apef (Association pour l’entreprenariat féminin) afin de répondre, ensemble, à leurs problèmes quotidiens. L’Apef est soutenue par Frères des Hommes.

document de référence rédigé le : 1er mars 2003

date de mise en ligne : 20 août 2004

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